00 – Au cœur de la démarche.

Quel est la démarche derriere les essais du discours de la méthode d'un cancre ?

00 – Au cœur de la démarche.
Photo by Pawel Czerwinski / Unsplash

Bonjour,

J’espère que vous allez bien, peu importe où vous êtes : dans un café, chez vous, dans les transports ou au travail. Nous ne nous connaissons sûrement pas, mais un lien entre nous s’est tissé lorsque vous avez cliqué sur cet article. Je serais d’ailleurs assez curieux de savoir ce qui vous a amené à lire ces premières lignes. À quoi vous attendez-vous ? À une série scientifique ? À quelque chose de philosophique ? Peut-être qu’avec un titre comme celui-là, vous vous attendez à quelque chose d’un peu humoristique ? Je vous laisse cette liberté de qualification. Pour ma part, je ne peux maîtriser que le ton de quelqu’un qui n’est ni écrivain, ni philosophe, ni psychologue, ni scientifique, ni sociologue, mais celui d’une personne qui cherche simplement à comprendre et à traduire une logique à travers des mots parfois un peu maladroits.

Cet ouvrage est la synthèse et l’intégration d’un travail d’observation, de recherche et d’exploration autour de l’Humain et de ses facettes. Ces études «faites maison» ont alimenté les 14 dernières années de ma vie et alimenteront encore les x prochaines. Vous y retrouverez un regroupement de différentes hypothèses, exemples et exercices pour essayer de comprendre le cerveau, la pensée, l’intelligence et la société. Il parle de biologie, d’art, de création, de communication, de langage, de corps, d’innovation, de collectivité, d’éducation, de gestion et de plusieurs autres productions culturelles qui ont pour dénominateur commun l’Homme.

Synthétisé dans un but pédagogique, d’abord pour moi puis pour les autres, j’ai essayé d’articuler ces hypothèses de la façon la plus simple possible. Vous remarquerez le mot «essayé», je ne vous garantis pas d’y arriver à chaque fois. Quelques-unes sont solides, d’autres moins et certaines encore incertaines, mais toutes ont été retranscrites dans ces pages pour stimuler des imaginaires, des questions et des critiques des pairs que vous êtes.

Comme cette série est donc le résultat de mon parcours à travers le laboratoire que l’on appelle «la vie», et ne peut être, malheureusement ou heureusement, dissociée de ma chair, comprendre les motivations et le cadre dans lequel ils ont été forgés devrait donc fournir le guide nécessaire à leur lecture.

Lorsque j’ai commencé mes études sur le sujet, je venais à peine de sortir d’un cursus scientifique de niveau master et, souffrant d’un sérieux problème d’orientation, j’étais complètement perdu. Comme beaucoup, la première question que l’on se pose le dos de la main sur le front est la suivante : «mais qu’est-ce que je vais faire de ma vie ????!!!!». Alors, avant de chercher un métier précis, je me suis donc mis en quête d’un domaine global d’attention. À la recherche d’une accroche quelconque, j’ai pris la décision de me concentrer sur ce que j’aimais faire : chercher. Autodidacte de passion, j’étais obsédé par l’exploration, la déconstruction et la compréhension des sujets qui attiraient mon intérêt. Il était donc naturel pour moi de vouloir comprendre le «processus de recherche» en lui-même, sujet qui s’est avéré être inséparable de ceux qui traitent de l’esprit humain. Les seuls problèmes, qui peuvent paraître majeurs lorsque l’on se lance dans une quête intellectuelle de la sorte, étaient que 1) je détestais lire (et ce goût ne s’est pas amélioré avec le temps…) et que 2) j’étais, en tout cas par rapport aux standards, nul en philosophie, en littérature et pas vraiment une flèche en science avec des scores respectifs de 4, 6 et 11 sur 20 aux épreuves du baccalauréat et pas mieux pendant mon cursus universitaire. Et je ne vous parle pas de mon retard à l’écrit. J’ai ce souvenir d’une copie corrigée par mon professeur de français sur laquelle reposait cette phrase : «votre orthographe frise l’analphabétisme». Ces problèmes se voyaient amplifiés lorsque je faisais un état des lieux de mes «connaissances générales». N’arrivant pas à remplir une page, j’ai estimé que je ne me souvenais que d’environ 5 % des concepts et connaissances qui m’ont été transmis en 12 ans d’études (collège, lycée et université combinés). Il fallait l’avouer, je me sentais cancre, surtout lorsque je me comparais à mes anciens camarades de classe, tous en doctorat ou en poste dans de grosses PME ou ETI. J’étais envahi par un sentiment d’injustice couplé à une grande frustration envers moi et le système en général. Ne me demandez pas d’où ça sortait, mais, animé par une volonté de me prouver capable, c’est le cancre frustré que j’étais qui a ouvert la porte sur le chemin que je continue et continuerai d’arpenter sans aucun remords ni regrets.

L’idée à l’époque était la suivante : quitte à ne savoir que peu de choses, autant en profiter pour se construire un raisonnement vierge de tout a priori et d’idées préconçues, non ? J’ai plus tard appris que cette démarche avait déjà été initiée par Descartes dans son best-seller, à qui j’ai emprunté une partie du titre. J’ai donc pris le terme «construire» au sens le plus littéral du terme. J’ai commencé mon aventure au plus proche de zéro, c’est-à-dire d’une page presque blanche. Puis, au fur et à mesure du projet, j’ai rempli ces pages de mots, de schémas, de ratures, de questions et d’autres phrases bien souvent dénuées de sens. «Presque» blanche, oui, parce qu’il est impossible pour un individu d’oublier les 5 % survivants de 23 ans de vie. Oui, j’avais 23 ans à l’époque. J’en ai un peu beaucoup plus maintenant. S’ils ont survécu tout ce temps, c’est simplement parce qu’ils forment la fondation même d’un courant de pensée et, par extension, d’un intellect. Ils représentaient une sorte de configuration initiale.

La «chance» que j’ai eue était que ce fameux petit quota de culture générale résilient mentionné plus haut appartenait aux domaines de la biologie et des neurosciences. Donc, au lieu d’étudier l’humain du point de vue de la sociologie, de la philosophie, de la linguistique ou d’autres sciences et domaines dont je ne connaissais rien, j’étais en possession des notions de base nécessaires pour commencer mon étude de la façon la plus pragmatique qu’il soit, du point de vue de l’essence même de l’Humain : sa biologie. Certains me diront que l’essence même serait du côté de la matière et de la physique, et ils auront raison, mais bon, il fallait bien commencer quelque part, non ?

Mais revenons à nos moutons. Le premier constat, qui ne demande en rien l’intervention d’un génie, fut que l’intégralité des hautes fonctions cognitives (langage, mémoire, perception, etc.) et du comportement devrait émerger de l’amas de cellules que l’on appelle «cerveau». Il était alors d’autant plus justifié de commencer par la biologie du cerveau. Pour prendre un exemple plus concret, vous serez plus apte à comprendre une automobile lorsque vous en connaissez la mécanique, l’ingénierie ou maintenant l’électronique plutôt que lorsque vous n’y connaissez rien : vous appréciez le véhicule et êtes conscient de l’ingéniosité derrière son fonctionnement, mais c’est tout, vous serez toujours dépendant de l’avis des spécialistes pour la réparer ou l’améliorer.

Le défi était donc «simple», au lieu de lire et d’étudier les écrits des intellectuels passés et présents pour se construire une culture générale, j’ai pris la décision d’utiliser une approche purement pragmatique, voire phénoménologique comme diraient les intellos : me baser sur mes observations et analyses pour en déduire des hypothèses qui seront confirmées et/ou réfutées par une série d’expériences. Si les effets observés dans un environnement étaient en accord avec ceux anticipés, alors mes idées pouvaient être validées et confrontées à un autre environnement. Les succès permettraient de valider mon modèle et surtout de prendre confiance en mes intuitions et idées, et les échecs permettraient leur optimisation. En d’autres termes, je me servirais de mes expériences comme substrats pour dessiner et architecturer mes connaissances. Vous reconnaissez là une démarche scientifique de «base». Utilisant donc ma vie comme laboratoire, j’ai pris plaisir à expérimenter plusieurs disciplines, métiers et domaines d’activités : danseur, chorégraphe, vendeur, photographe, enseignant, technicien, graphiste, metteur en scène, directeur, vidéaste, entrepreneur, webdesigner, serveur, etc., et maintenant consultant et demain peut-être autre chose. Chaque expérience accumulée a été le sujet de nouvelles observations, analyses et hypothèses qui étaient comparées aux expériences suivantes.

Et d’action en action, de «pourquoi» en «comment», de «oui !» en «non, ça ne fonctionne pas», à l’époque libéré de tout domaine, carrière et obligation quelconques, j’ai pu me confronter à des concepts intrinsèques à la sociologie, la philosophie, la linguistique ou autres sciences dont je pouvais désormais établir des connaissances critiques. Et au final, ce qui avait commencé par une quête de la compréhension de l’intelligence humaine s’est transformé en une quête d’universalité de l’intelligence animale…

Gd.